Cocherel, Verneuil, Formigny, La Hougue… Si on a beaucoup croisé le fer en Normandie, cette situation s’explique d’une part par les relations souvent belliqueuses avec l’Angleterre voisine. Deuxièmement, les Normands se sont parfois soulevés : le pouvoir a alors réprimé sur le champ de bataille des révoltes qui risquaient d’entraîner la sécession d’une si riche province.
La bataille de Viridorix (56 avant J.-C.), ils sont fous ces Gaulois
Combat de Romains et de Gaulois (détail), huile sur toile d’Evariste-Vital Luminais (Nantes, 1822 – Paris, 1896). Musée des Beaux-Arts de Carcassonne.
Les historiens ne savent pas exactement où elle s’est déroulée (dans l’actuel département de la Manche probablement) mais connaissent les belligérants. D’un côté les légions romaines commandées par le lieutenant de César, Sabinus. De l’autre, des Gaulois menés par Viridorix, le chef de la tribu des Unelles. Ce Vercingétorix avant l’heure essaie de secouer le joug romain en rassemblant les peuples traditionnellement désunis de la Gaule du nord-ouest. Le jour de la bataille, les Romains font courir dans le camp adverse le bruit qu’ils se préparent à fuir le combat. Croyant saisir une opportunité, les Gaulois s’élancent à l’attaque, s’essoufflent à passer les fortifications romaines puis sont engloutis par la contre-attaque mûrement préparée de Sabinus.
La bataille de Val-ès-Dunes (1047), le début de l’ascension d’un grand duc.
Tournage du film « Guillaume, la jeunesse du Conquérant ». Photo par Hell.Isa sur Flickr.
A l’est de Caen, le duc de Normandie, Guillaume le Bâtard âgé de 19 ou 20 ans met en déroute les barons normands révoltés. Cette victoire clôt une longue période d’instabilité au cours de laquelle l’autorité ducale fut bafouée au point qu’il faillit succomber à une tentative d’assassinat. Val-ès-Dunes inaugure une série de victoires (Mortemer, Varaville, Hastings) pour celui qu’on finira par surnommer Guillaume le Conquérant.
La bataille de Tinchebray (1106), Hastings à l’envers.
En 1066, le duc de Normandie Guillaume le Conquérant triomphait du roi anglo-saxon Harold et réunissait ainsi sur sa tête les couronnes d’Angleterre et de Normandie. En 1106, c’est l’inverse : le roi d’Angleterre Henri Ier Beauclerc, troisième fils de Guillaume, l’emporte à Tinchebray contre son frère aîné Robert Courteheuse, duc de Normandie. Le vainqueur récrée l’unité anglo-normande. Pour autant, comme le précise l’historien Roger Jouet, on ne peut pas lire la bataille de Tinchebray comme la « revanche de l’Angleterre anglo-saxonne sur la Normandie. Il s’agit d’une guerre purement normande, entre frères et seigneurs normands ».
La bataille de Cocherel (1364), le cadeau offert pour le sacre de Charles V
Les batailles de la guerre de Cent Ans ne sont pas toujours des affrontements entre Anglais et Français. En 1364, sur les bords de l’Eure, le capitaine Du Guesclin remporte pour le compte du roi de France Charles V la victoire contre une armée anglo-navarraise-gasconne, autrement dit des Anglais alliés à des Français. La nouvelle du succès parvient aux oreilles du roi, la veille de son sacre.
La bataille de Verneuil (1424), l’Azincourt normand
Bataille de la guerre de Cent Ans beaucoup moins connue qu’Azincourt, elle y ressemble beaucoup dans son scénario et son résultat. Bien qu’inférieurs en nombre, les Anglais, aidés de leur précieux archers, défont une armée royale composite et désunie. Les morts (de 5000 à 7000) se comptent aussi nombreux qu’en 1415. Il faut dire que les Anglais se sont fait un plaisir de massacrer leurs voisins et meilleurs ennemis Ecossais qui formaient à cette époque le gros des troupes françaises.
La bataille de Formigny (1450), la revanche française
Encore une bataille de la guerre de Cent Ans, un conflit décidément stratégique pour la Normandie. Après les désastres de Crécy, Poitiers, Azincourt et Verneuil, l’armée française commandée par le comte de Clermont et renforcée au dernier moment par les troupes du connétable de Richemont se rachète en battant les Anglais à Formigny, dans le Bessin. Pour une fois, la chevalerie s’est retenue d’attaquer la première. Peu après cette victoire, Caen se rend puis Cherbourg tombe. En cette année 1450, les Anglais sont définitivement boutés hors de Normandie !
La bataille d’Ivry (1590), une victoire d’Henri IV avec panache
Après la mort du roi Henri III (assassiné), Henri IV hérite du trône de France mais il se heurte à l’opposition de la Ligue, un parti d’ultra-catholique qui ne veut pas de ce roi de confession protestante. D’abord, Henri bat les Ligueurs à Arques près de Dieppe. Puis il récidive à Ivry, dans le département de l’Eure. Bien qu’inférieurs en nombre, ses troupes battent celle du duc de Mayenne, le chef des Ligueurs. La légende veut que le roi, élevant son chapeau à la main, ait clamé cette parole décisive avant la bataille : « Ralliez vous à mon panache blanc ! ».
La bataille de la Hougue (1692), défaite navale
Comme Napoléon plus tard à Trafalgar, Louis XIV n’arrive pas à casser la suprématie navale des Anglais. Or tout plan envisageant l’invasion de l’Angleterre nécessite au préalable la maîtrise de la Manche. Au large de Barfleur, l’amiral Tourville, pourtant le meilleur capitaine de mer de sa Majesté, se retrouve piégé avec sa flotte par les navires anglo-hollandais. Incapable de trouver un abri (Cherbourg n’est pas encore un port fortifié), il voit ses bateaux brûlés un à un par l’ennemi.
La bataille de Brécourt (1793), «la bataille sans larmes»
Au début de l’été 1793, une armée composée de Normands et de Bretons se dirige vers Paris en chantant une version régionale de la Marseillaise :
« Aux armes citoyens !
Terrassez les brigands
La loi, la loi, c’est le seul cri,
C’est le vœu des Normands ».
Le but de ces troupes : libérer la Convention (l’Assemblée Nationale de l’époque) de l’influence des députés montagnards et de leur soutien sans-culotte. Mais l’ardeur de ces rebelles (Paris les appelle « fédéralistes ») s’essouffle rapidement. Le 13 juillet, des volontaires parisiens arrivent à leur rencontre près de Vernon pour les arrêter. Un coup de canon est tiré et c’est la débandade dans le camp fédéraliste. La bataille n’a fait aucun mort d’où son surnom de « bataille sans larmes » !
La Bataille de Normandie (1944), the big One
Débarquement sur les côtes normandes de soldats américains le 6 juin 1944. CPhoM. Robert F. Sargent. (Coast Guard). Ministère américain de la Défense.
On termine dans la démesure avec cette bataille dont le champ couvrit la région entière, mit aux prises 3 à 4 millions de soldats, s’étala sur plus de trois mois et eut pour objectif rien de moins que la libération de l’Europe occidentale. Commencée sur les côtes du Calvados et de la Manche par le débarquement du 6 juin, la bataille se conclut par la prise du Havre le 12 septembre 1944. Une ville devenue méconnaissable par les combats au sol et les attaques aériennes, à l’image de nombreuses autres localités de Normandie.
Passionnant !
Bravo !
Félicitation ! Il manque une bataille le débarquement où la tantative de débarquement en 1942 à Dieppe !
Magnifique recherche de l’histoire que vous développez
Beaucoup de recherche et d’explications sont en détails et l’histoire est développée avec plein d’attention.
Bonne continuation, bien cordialement.
Merci pour ces encouragements.